Antoine GANNAC

Il est de ceux qui préfèrent être solitaire plutôt que populaire, qui choisissent les coulisses à la scène, de ceux qui repèrent le détail qui va révéler l’ensemble, de ces adeptes du mystère alors qu’ils révèlent le grand jour, de ces pudiques qui exposent et dévoilent … Antoine Gannac est l’INCLASSABLE du jury pro. Curieux de tout, il sait mieux que quiconque tirer un fil pour dérouler une histoire, il sait tordre une idée dans tous les sens, il est maître es-maïeutique et n’a pas son pareil pour accoucher l’autre. Il est exigeant, intransigeant, comme ceux qui savent ce qu’ils veulent, a peu de patience avec la médiocrité, n’aime pas les points de suspension et les paresseux, tire vers le haut. Toujours plus haut. Il est de ceux qui laissent une trace.

Il a commencé le journalisme par la voix et la plume, il y a 40 ans « par une interview de John Lucarotti, an english man in Aiacciu. Il habitait à deux pas de chez ma grand-mère, dans un appartement perché tout en haut d’un immeuble de A Calata. Scénariste prolixe, John a écrit une dizaine d’épisodes de Chapeau Melon et Bottes de Cuir et de nombreux autres feuilletons. Parfois, nous nous retrouvions au Phileas Fogg, un restaurant de la rue Saint-Charles où l’on voyageait par le goût et par les récits qu’il n’avait pas son pareil pour inventer. Cela mettait une saveur épicée dans mon quotidien de journaliste spécialisé dans les affaires criminelles et judiciaires ».

Vingt ans plus tard, il ajoute l’image à son arc et découvre un nouveau métier. Il crée alors une société de production. Et comme à chaque fois qu’il s’aventure, il transforme l’essai et prospère. « GBProd m’a permis de voyager dans de nombreux pays où, comme en Angleterre, on conduit à gauche. J’y ai tourné de nombreuses émissions et compris surtout, sans chauvinisme aucun, qu’on ne vit nulle part aussi bien que sur notre île. »

Au cours de sa riche carrière, il a rencontré bon nombre de personnes, bon nombre de « sujets » – « des gentils et des méchants que j’ai approchés en gardant mes distances pour ne pas me perdre (militants politiques épris de liberté et/ou corrompus, hauts fonctionnaires engagés et/ou enragés… et même des agents anglais qui vous proposent au détour d’une bière de faire du renseignement pour le service secret de sa Majesté) ».

Son film anglais préféré : « « Pride », un film basé sur une histoire vraie, qui nous transporte dans l’Angleterre des années Thatcher. Un groupe de militants gays et lesbiennes est touché par la longue grève des mineurs et décide de réunir des fonds pour aider les familles. Les activistes décident de débarquer dans un village minier du Pays de Galles pour apporter son soutien financier… Et s’il fallait dire aussi ma chanson préférée en relation avec l’Angleterre, je pense que j’aurais un petit faible pour « Miss Maggie » de Renaud. »  

S’il devait être réincarné, « Phileas Fogg me conviendrait assez. Pour le flegme, l’imagination et les aventures de voyages. » CQFD.

On s’en serait douté, enfermé à Buckingham, notre hyperactif préféré meurt « de froid et d’ennui en attendant la réouverture ». Et « le Festival idéal est celui qui réunit des amoureux de cinéma qui s’emballent pour un film, doutent le lendemain en en voyant un autre, retiennent leur souffle en se demandant ce que le public aimera, restent sur leur siège jusqu’à la dernière image du générique, se laissent bousculer dans leurs certitudes. » Comme nous avec lui, Antoine Gannac est plutôt bien tombé.